Lu sur Rue89, d’après une traduction de Global Voice. On vous conseille la lecture de l’article en intégralité, qui présente brièvement la scène antifasciste russe contemporaine.
Avec ses tatouages sur les bras et sa boule à zéro, Socrate (né Alexei Soutouga) ne ressemble guère à un philosophe grec. Mais à l’instar de son homonyme, sa politique lui a attiré des ennuis avec les autorités.
Au cours des dernières années, il est devenu un leader bruyant dans la communauté punk anti-fasciste (antifa), mouvement de réaction face aux effectifs toujours plus nombreux des groupes ultra-nationalistes et néonazis de la Russie.
Aujourd’hui, suite à un évident simulacre de procès, il purge une peine de trois ans de prison. Bien que considérés parfois comme des mouvements marginaux, les groupes punk fascistes et antifas exercent une certaine influence, gagnant peut-être même les plus hautes sphères des médias et du gouvernement russe.
Incarcéré après un procès suspect
La condamnation de Socrate a surtout porté sur le rôle qu’il a joué dans une bagarre en janvier dernier. Selon les autorités, lui et trois complices auraient attaqué des jeunes au café Sbarro, à Moscou, en brandissant un marteau bricolé.
Socrate a cependant déclaré n’avoir fait que parler aux accusés, qui l’avaient reconnu pour un leader antifasciste.
Plus tard, le groupe s’est retrouvé pris dans une rixe, dans une salle adjacente, où Socrate est intervenu pour séparer les protagonistes.
D’après Mediazona, un site « watchdog » [littéralement : « chien de garde », sorte de site web observatoire d’un phénomène donné, ndlr] pour les droits des détenus, l’affaire fourmille de détails suspects.
Et notamment un : les trois hommes prétendant avoir été attaqués par Socrate ont participé à des rassemblements néonazis et témoigné maintes fois auparavant dans des procès contre des antifascistes.
Des documents du tribunal comportaient des dates qui ne correspondaient pas, certaines antérieures à la prétendue agression, donnant ainsi aux experts judiciaires des raisons de penser que le procès avait été monté de toutes pièces contre Socrate.
Plus récemment, on a rejeté sa demande d’appel au motif qu’il l’aurait soumise trop tard, bien que d’après les avocats de Socrate, le gouvernement aurait, encore une fois, changé la date du document pour éviter un nouveau procès.
Il se peut que la notoriété accrue de l’intéressé l’ait mis dans le collimateur du gouvernement. Son rôle de leader au sein des milieux antifas, connus pour leur opposition farouche au Kremlin, s’est précisé au cours de l’an passé.
Après avoir été inculpé dans différentes affaires, il a été relâché en début d’année, en vertu de la même loi d’amnistie qui libéra des membres des Pussy Riot.
L’effervescence médiatique qui s’est ensuivi a valu à Socrate une interview avec la seule chaîne de télévision indépendante de Russie, TV Dojd [TV Pluie], au cours de laquelle il a milité pour les droits des détenus.