Interview de Stéphane François dans Libération : « L’identitaire Vardon peut nuire à la stratégie de normalisation du FN »
L’avenir de Philippe Vardon, ex-leader des identitaires niçois, au sein du Rassemblement Bleu Marine est toujours aussi confus. Admis « par erreur » au sein de la coalition souverainiste - selon l’avocat Gilbert Collard -, Vardon a tenté d’expliquer sa démarche sur son site. Plus tôt dans la journée, Marine Le Pen avait répondu de manière alambiquée à l’Express sur le ralliement de cet homme sulfureux, signe de l’embarras que la question suscite au sein du Front national. Chercheur associé au Groupe sociétés religions laïcités (GSRL) du CNRS, l’historien Stéphane François revient sur cette adhésion ratée.
Comment analysez-vous la vraie-fausse adhésion de Philippe Vardon ?
Cette affaire n’est pas encore terminée. D’après ce que l’on sait actuellement, des membres du Front national auraient été à la manœuvre pour recruter Philippe Vardon, procédure qui aurait ensuite été bloquée par Marine Le Pen. C’est assez étrange de la part de la présidente du Front national. Notamment parce qu’elle avait déjà lancé un appel aux régionalistes, lors d’un discours en Corse l’an dernier, en parlant du « peuple corse ». C’est une évolution sémantique intéressante, car cette question a toujours été un sujet de discorde entre le FN et les identitaires. Le premier est un parti nationaliste, jacobin, alors que le Bloc est sur des positions régionalistes.
Qu’est-ce qui freine alors Marine Le Pen ?
Le personnage Vardon : il a déjà été condamné par la justice [pour reconstitution de ligue dissoute et discrimination, ndlr] . Cela pourrait nuire à la stratégie de normalisation que veut donner le FN. Par ailleurs, les dirigeants du Bloc ont un passé plutôt chargé. Ils viennent d’Unité radicale [un groupuscule d’extrême droite dissous en 2002 après la tentative d’assassinat d’un de ses membres, Maxime Brunerie, sur Jacques Chirac, ndlr] . Mais d’un autre côté, si Marine Le Pen veut des candidats intelligents et crédibles, elle va devoir aller chercher des gens aguerris comme Vardon, et pas uniquement des jeunots comme c’est le cas actuellement. Il faut aussi signaler que le candidat soutenu par le FN à Nantes pour les prochaines élections s’appelle Christian Bouchet : c’est une figure du nationalisme révolutionnaire, ancien cadre d’Unité radicale, mouvement qu’il a quitté avant la tentative d’assassinat de Brunerie.