Un petit retour sur l’Université d’été d’Academia Christiana en Anjou, lu sur le site du Réseau Angevin Antifasciste :
Comme chaque été depuis 2013, le mouvement nationaliste Academia Christiana a organisé son université d’été. Mais cette année, au lieu qu’elle se déroule à l’institut des Croix-Des-Vents, à Sées (Orne), la rencontre a eu lieu dans une autre école, à Nyoiseau (Maine-et-Loire) : Notre-Dame d’Orveau. Ce changement n’a rien d’un hasard et est même assez logique quand on connaît le passif à la fois de ce mouvement et de l’institution qui l’a accueilli. Cet article s’attachera à donner des points de repère pour comprendre l’historique et le contexte qui ont permis la visite des nationalistes en Anjou du 17 au 22 août dernier.
Pourquoi un changement de lieu ?
Tout d’abord, commençons par un petit rappel concernant cette université d’été. Celle-ci est organisée par Victor Aubert, lui-même enseignant à l’institut des Croix-Des-Vents, à Sées. C’est donc logiquement là-bas qu’il organise, en compagnie d’autres nationalistes, ces événements. Mais à partir de l’été 2019, une série de petits scandales vont venir écorcher l’image de façade de ces réunions présentées comme inoffensives auprès des habitant.e.s du coin. Alors que même Marion Maréchal refuse d’y être invitée (c’est dire), le maire de Sées va accepter de participer à une des conférences, ce qui va ensuite lui être reproché lors d’un conseil municipal. Victor Aubert va alors être accusé d’être un personnage infréquentable ayant « piégé » le maire. Aubert réagit dans la presse locale et change son pseudo sur Facebook (auparavant son nom était Ober, qui est aussi un grade de la Wermacht…). A cette occasion, il revêt son plus beau costume pour montrer à tou.te.s qu’au fond, il n’est pas vraiment méchant.
L’affaire aurait pu s’arrêter là, mais certain.e.s lecteur.trice.s de La Horde se sont rappelé.e.s que quelques temps auparavant, le site antifa avait publié un article où on voit une vidéo de Victor Aubert effectuant un salut nazi à une manif pour tous. Le plus incompris des normands se retrouve de nouveau à devoir se défendre dans la presse. Cette fois-ci, il explique que ce n’était qu’un « salut romain » … Bon, pour nous, quand on se frappe la poitrine avant de tendre le bras droit au milieu de militants du GUD, ça fait quand même un peu facho. Quoi qu’il en soit, pour Victor Aubert qui espérait se retrouver sur une liste aux élections municipales de 2020, ça fait tâche.
Est-ce que ce sont toutes ces raisons qui ont obligé les nationalistes à déménager pour leur université d’été 2020 ? C’est une possibilité. Mais pas d’inquiétudes, le lieu idéal pour les héberger existe… Notre-Dame d’Orveau !
Pourquoi Notre-Dame d’Orveau ?
Et oui ! Quoi de plus logique pour Victor Aubert, et une partie de ses ami.e.s, de revenir là où illes ont effectué.e.s leur scolarité quand illes étaient enfants ? Car Aubert est très loin d’être le seul militant nationaliste à être passé par cet internat privé sous contrat. En Anjou, c’est même presque la norme. Rien qu’en ce qui concerne l’Alvarium, et son réseau de proches, dresser une liste serait fastidieux. On peut quand même citer la famille Gannat, la famille Fleury, Pierre Trémolet De Villers, Paul-Alexis Husak, Thomas Gueyffier, la famille Cochin, Théodore Riant, Louis Simonet… Bien sûr, au moment de leur passage dans cette école, illes n’étaient pas tou.te.s les sinistres personnages qu’illes sont devenu.e.s ensuite. Parfois même, illes avaient l’air plutôt inoffensif.ive.s. Petite illustration avec Paul-Alexis Husak :
A noter également que l’école accueille parfois des enfants de « stars » comme une des filles de Marine Le Pen ou encore des enfants de Philippe de Villiers.
On commence à le comprendre : Notre-Dame d’Orveau c’est beaucoup une histoire de réseau. Mais l’homogénéité de celui-ci repose aussi sur l’importance des liens familiaux. Par exemple, on remarque que plusieurs militant.e.s ou proches de l’Alvarium ont des parents plus ou moins investi.e.s dans l’école. Pour Thomas Gueyffier, sa mère (Caroline Gueyffier) est surveillante de l’internat filles et son père (Patrice Gueyffier) est attaché de gestion pour l’école. Pour Louis Simonet, c’est sa mère (Laurence Simonet) qui est secrétaire de l’association des parents d’élèves. Quand à Hugues Soreau, son père (Emmanuel Soreau) est intervenu ponctuellement au « forum des métiers » …
Et puisqu’on parle de famille, comment ne pas parler de celui qui a été directeur de l’établissement de l’été 2013 à l’été 2020 (1) : Yann De Cacqueray-Valmenier. Ce nom vous dit quelque chose mais vous n’êtes plus sur d’où vous l’avez entendu ? Le schéma ci-dessous va vous aider à y voir plus clair.
Sur le schéma, en dehors de Yann, on retrouve donc son fils Louis. S’il a réussi un temps à se faire une place à la mairie du Mans sous l’étiquette RN, ses sympathies vont bien au-delà du parti et ses idées rejoignent pour une bonne partie celles des nationaux-catholiques. Il est un proche de Jean-Eudes Gannat et soutient logiquement Academia Christiana, comme en témoigne son retweet, quelques jours après l’université d’été, d’un message plutôt équivoque.
Toujours sur le schéma, on retrouve également Régis, aumônier du mouvement Civitas. Sur la photo, à la première université d’été de Civitas en 2018, il est au centre. A gauche, on retrouve Alain Escada et à droite, l’Abbé Beauvais. Marc, enfin, le petit dernier est la tête brûlée de la famille. Il est surtout l’un des meneurs des Zouaves, un groupe parisien plus connu pour sa violence que pour ses prises de parole. Sur la vignette de gauche, il participe à un tournoi de sport de combat. Sur les vignettes de droite, toujours avec le même sweat M8l8th (2), à un « nazi-versaire » en train d’effectuer des saluts nazi et de crier « sieg heil » . Ces vignettes sont extraites d’une vidéo qu’a révélé Mediapart.
Certes, cette famille est « particulière », mais certains pourraient encore douter des raisons de la place de Yann de Cacqueray-Valmenier sur ce schéma, ou encore de son rapport à l’université d’été d’Academia Christiana. Après tout, il aurait pu se faire avoir et ne pas avoir bien compris à qui serait louée l’école en ce mois d’août, non ? Le problème c’est qu’il a aussi écritun chapitre dans un ouvrage sur l’éducation dirigée par Louis-Marie de Blignières, dont on vous parlait déjà dans un article il y a presque un an (et où on parlait déjà de l’université d’été d’Academia Christiana d’ailleurs). Ce n’est pas tout, parmi les personnalités qui ont été invitées à l’école, du temps où Yann De Cacqueray-Valmenier était directeur, certaines on retenu notre attention…
Reynald Secher, historien controversé (3), y est venu partager sa vision des guerres de Vendée, sujet récurent dans l’extrême-droite catholique. Quand à Jean-Frédéric Poisson, il a été invité pour animer une conférence sur le thème « Y a-t-il une place pour les chrétiens en politique ? » Un peu naïf comme titre, pour ce conservateur qui prône « l’union des droites » (ce qui inclut les plus radicales)…
On peut donc dire que Notre-Dame d’Orveau n’est pas une école comme les autres et que la formation politique y a aussi sa place. Mais est-ce que ces idées arrivent à toucher les élèves qui y sont scolarisé.e.s ? Sans doute pas tou.te.s, mais suffisamment pour que de drôles d’images apparaissent dans les vidéos censées faire la promotion de l’établissement et de son internat sur Youtube :
Concrètement, ça a donné quoi ?
Au final, une fois cette (un peu longue mais essentielle) mise en contexte effectuée, on comprend mieux comment la dernière université d’été d’Academia Christiana s’est retrouvée à Notre-Dame d’Orveau. Le dernier soir s’est conclu par un concert du groupe nationaliste FTP, dont une photo en particulier trahit l’endroit où l’événement a eu lieu.
Le reste de la semaine fut comme d’habitude un condensé de ce que ces milieux savent produire : un mélange de conférences qui regrettent le bon vieux temps et exècrent le monde d’aujourd’hui, ponctué par des ateliers sport de combat ainsi que des fêtes en soirée. Un mot tout de même, pour insister sur le fait que les séances de sport ne sont pas si anodines qu’il n’y paraît : cette photo nous a permis de reconnaître un ancien militant du GUD dont le tatouage fait plus référence à son amour de la bagarre de rue qu’à l’esprit sportif…
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