« Les Antifas sont les vrais fascistes » – La question de la violence

Nous reproduisons ici ce texte de l’association toulousaine Eunomia qui permet d’aborder la question de la violence et de déconstruire les critiques et arguments tendant à mettre sur un pied d’égalité le camp politique fasciste d’une part et le mouvement antifasciste d’autre part. Même si nous ne partageons pas nécessairement tous les points de vue détaillés ici, ce texte a le mérite d’être clair, accessible, de proposer des éléments de définitions et des repères, mais aussi de lever la confusion sur la notion de violence politique et l’antifascisme aujourd’hui.

liberal aveugle

Vous l’avez sans doute déjà entendue, cette phrase toute faite : « les vrais fascistes ce sont les antifa », sous-entendu, ceulles qui correspondent vraiment à l’expression actuelle de la « méthode fasciste » (violence, autoritarisme, actions de groupes cagoulés). Vous l’avez même peut-être prononcée. Vous en êtes peut-être même convaincu·e. En comment ne pas en être convaincu·e ?

CollageCahors3
Cahors
Et puis même que c’est Churchill qui l’a dit [1]

Des gens qui se masquent et qui vont en groupe agresser des personnes au titre de leurs opinions supposées. C’est la police de la pensée, iels divisent la lutte, iels font le jeu du grand capital et de Macron. Iels sont d’ailleurs peut-être financé·e·s par les bourgeois·es pour rendre la lutte sociale impopulaire et faire fuir les pacifistes.

Cet article n’est pas là pour vous crier dessus ou vous prendre par le col et vous botter les fesses. Il y a d’ailleurs des critiques tout à fait légitimes et pertinentes à faire à la posture et aux méthodes des antifascistes. Mais pour pouvoir faire la critique d’un sujet, la moindre des choses c’est de le connaitre. C’est donc l’objet de ce papier : expliquer ce qu’est l’antifascisme, quelles sont leurs stratégies, leurs méthodes et leurs objectifs. Le tout en discutant un peu de la question de la violence en politique.

C’est donc plus dans le but de faire comprendre la position « antifa » que d’essayer de convaincre que c’est la seule et unique méthode qui marche, que je vais m’adresser à vous. Ainsi, vous serez en mesure de comprendre un autre point de vue, quitte à vous en dissocier par la suite, voire le critiquer vertement.

Qui sont les « antifa » ?

Tout d’abord, il faut bien comprendre que « les antifascistes » dont on parlera dans ce dossier, ne sont pas un groupe de personnes véritablement identifiées. On ne peut pas les rejoindre ou en devenir membre, il n’y a pas d’uniforme officiel (toute personne masquée en manifestation n’est pas forcément antifa et tou·te·s les antifa ne portent pas forcément un masque) ou de carte officielle, il n’y a pas de cotisation ou de listing.
Il n’y a d’ailleurs pas non plus de site web officiel ou de structure hiérarchisée avec des représentant·e·s nommé·e·s par le groupe (si ça vous rappelle les gilets jaunes, vous êtes sur la bonne voie pour comprendre).

Bref l’antifascisme ici, ce ne sont pas des personnes mais plutôt une position éthique, philosophique et pratique. En gros, c’est moins quelque chose qu’on est que quelque chose qu’on fait. Ce qui veut dire que, qui que vous soyez, l’objectif est de s’opposer au fascisme par tous les moyens nécessaires.

La plupart des gens sont contre le fascisme. Au moins un minimum. Mais c’est vraiment le fait de s’y opposer par « tout moyen nécessaire » qui vous fait vraiment entrer dans une logique, une posture antifasciste. Et même si, comme vous le savez sans doute, ces moyens incluent parfois la violence (j’en reparlerai plus tard dans le dossier), la plupart du temps, ces actions concernent d’autres méthodes et d’autres actions :

  • Contacter un hôtel, un centre de conférences ou un média pour les prévenir que des rassemblements fascistes sont sur le point de s’opérer chez eux pour les faire annuler est une action antifasciste
  • Identifier les personnes présentes à des rassemblements fascistes et prévenir leurs employeur·se·s pour les faire virer est une action antifasciste
  • Se présenter à un rassemblement fasciste en très grand nombre pour les submerger par un contre-rassemblement pacifique est une action antifasciste
  • Arracher leurs posters à la fac, nettoyer les croix gammées dans le métro, organiser des cyber-attaques pour fermer leurs sites web, demander à la Fnac d’arrêter de vendre leurs livres, envoyer un·e infiltré·edans leurs groupes pour filmer en caméra cachée leur fonctionnement interne… Tout cela sont des actions antifascistes.
    Et les conséquences de ces actions n’ont par pour seul but d’aider des personnes mais bien de réduire la capacité des fascistes à profiter de la frustration et du sentiment d’impuissance des certains groupes sociaux pour recruter.

Ces moyens d’action sont les plus courants et n’impliquent a priori aucune confrontation physique avec des militant·e·s fascistes. Par contre, cela rend beaucoup plus coûteux socialement d’entreprendre des actions de mobilisation fasciste (ce qui aurait tendance à dissuader des personnes à la marge de ces groupes à les rejoindre dans la mobilisation).

Pourquoi iels ne sont pas libéraux

En réalité vous ne trouverez que peu de libéraux·les dans les groupes antifascistes. Et cela principalement parce que l’idéologie libérale est très compatible avec de nombreux aspects de la rhétorique d’extrême droite. Ou, pour le dire autrement, l’idéologie fasciste fonctionne très bien quand il s’agit de convaincre des libéraux·les.

Et c’est le cas principalement parce que les tenants de l’idéologie libérale :

  • Se considèrent comme des personnes modérées et non-idéologisées. Iels ont d’ailleurs tendance à présenter le libéralisme non pas comme une idéologie mais comme du « bon sens » de la « logique pure et factuelle ». Ce qui ne les forme pas politiquement à comprendre les ressorts d’une idéologie.
  • Sont la plupart du temps dans une posture de glorification de la « liberté d’expression » dans une perspective très républicaine. On connait bien la phrase maintes fois recrachée «  Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire » attribuée faussement à Voltaire. Cette posture les rendant extrêmement sensibles à la propagande.
    C’est le fameux paradoxe de la tolérance : que fait-on des personnes dont le discours menace en lui même l’existence de la tolérance. Doit-on le tolérer ? En réalité, les philosophes libéraux·les ont ouvert là une brèche dans laquelle les fascistes ont savamment su s’engouffrer.

En effet, le philosophe nazi Carl Schmitt a, dès les années 30, posé un constat sur le libéralisme (système qu’il détestait complètement) qui est une forme, selon lui, d’ « imprécision toujours en attente, avec l’espoir que l’explication définitive, le combat sanglant décisif peut être évité dans un débat parlementaire et éternellement remis par une discussion perpétuelle ».

RIP-pavlosLille
Lille

En effet, il avait réalisé que dans une société libérale et républicaine comme celles de l’Europe de l’entre-deux guerres, les nazis pourraient « déguiser » leur propagande en « juste un point de vue politique parmi d’autres ».

Ce qui leur permettait de réclamer que ce point de vue puisse être exprimé et entendu par le plus de personnes possible afin qu’il soit débattu. Quand bien même l’objectif n’est pas vraiment de débattre sur la base d’arguments factuels ou rationnels.

D’autant que dans un système libéral et capitaliste, les inégalités d’accès à l’éducation et à l’information ne sont pas un problème (ceulles qui gagnent sont toujours les plus méritant·e·s). Et ces inégalités structurent donc, dans la population globale, une absence de formation à l’esprit critique, à l’analyse politique ou à l’éducation aux médias. Ce qui rend la population d’autant plus perméable à la propagande d’extrême droite.

KillahPBosnieHerzegovine
Bosnie Herzegovine
Affiche de propagande mussolinienne 

C’est d’ailleurs exactement cette idéologie libérale qui promeut le débat télévisuel permanent comme source d’information fiable pour savoir le vrai du faux. Argument ultime quand il convient de parler des « antifa »  : ces gens refusent le débat, ils sont sectaires, ils ne croient pas dans la vertu de la liberté d’expression.

En face, les gens « Charlie », qui sont raisonnables et modéré·e·s, sont convaincu·e·s que celui·le qui est d’extrême droite n’a juste pas accès aux bonnes informations. Puisque si iel avait reçu la bonne éducation, si iel possédait un bon esprit critique et des moyens de ne pas tomber dans les fake news alors celui·lle-là qui est aussi raisonnable serait vite convaincu·e de laisser tomber les chimères du fascisme.

On ajoutera d’ailleurs que la question de la liberté d’expression est systématiquement utilisée comme un voile pour draper le véritable problème. En réalité, tout le monde est en faveur d’une restriction de la liberté d’expression (pour l’appel au meurtre par exemple). La question est plutôt quelle restriction est légitime et donc, quel discours est légitime à être tenu en public.

Un combat profondément ancré à gauche

Si vous observez la composition des groupes antifascistes, vous vous rendrez compte que ces derniers sont plutôt représentés par des personnes situées à gauche des libéraux/républicains/socio-démocrates : principalement des anarchistes, des communistes ou d’autres groupes idéologiques qui critiquent fermement le libéralisme (on peut facilement l’observer à partir des drapeaux et logo antifascistes faisant clairement référence aux idéologies des communs et de l’autonomie).

Cependant on peut aussi y trouver des personnes n’ayant pas particulièrement choisi d’idéologie précise mais s’étant engagées dans un groupe local d’action antifasciste pour répondre à des problématiques locales.

Des groupes locaux et décentralisés depuis longtemps

Eh oui, n’en déplaise aux partisan·e·s de la théorie de « Georges Soros finance les antifa pour déstabiliser le pays », il n’existe en réalité aucune structure antifasciste qui prédomine les groupes antifa.

Ces derniers ont plutôt tendance à s’organiser localement (donc à l’échelle d’un quartier ou d’une ville) et flexiblement (donc en fonction des problématiques rencontrées sur place).

Ainsi, si les GI (Générations Identitaires) ou l’AF (Action Française) de Toulouse organise un évènement, ce sera entre autres l’UAT (Union Antifasciste Toulousaine) qui pourra organiser une contre-manifestation pour répondre spécifiquement à ce problème.

Et ce fonctionnement est en fait très ancien. En effet l’antifascisme a une très longue histoire. Depuis le début de XXème, il s’est cristallisé en même temps que le fascisme, quand des personnes, parmi la gauche et la gauche révolutionnaire notamment, s’organisent pour le combattre.

Antifa italiens en 1921

Par exemple en Italie et en Allemagne (berceaux du fascisme) : Arditi del Popolo (anarchistes antifascistes qui s’opposèrent aux chemises brunes italiennes) et Antifaschistische Aktion. Et dès que des groupes fascistes se créèrent à Londres (British Union of Fascists), aux États-Unis (Friends of New Germany) ou en France (le Faisceau), des groupes locaux antifascistes furent créés par des citoyens engagés (souvent anarchistes et/ou marxistes).

PavlosLille
Lille
Antifa allemands en 1932

Et depuis que des personnes s’engagent politiquement contre le fascisme, une question, plutôt légitime, ne cesse d’être posée : est-ce que ça marche ?

Une tactique à interroger

Et depuis que l’objectif de l’antifascisme est d’empêcher des individus ou des groupes de mettre en place des actions fascistes à l’échelle plus ou moins locale et plus ou moins spécifique, la question de la pertinence de telle ou telle action est sans cesse posée.

Ainsi, comme les actions antifascistes sont très diversifiées, on ne peut pas vraiment répondre de manière globale à une question comme « est-ce que ça fonctionne ? ». C’est un peu comme si on se demandait si « la grève, est-ce que ça fonctionne ? » ou « manifester, est-ce que ça fonctionne ? ». Ces questions sont trop vagues pour obtenir une réponse car cette réponse dépendrait surtout du problème auquel cette tactique est censée répondre, de la manière dont cette tactique est mise en place et surtout, de ce qui sera considéré comme un résultat positif (qui montrerait que l’action a fonctionné).

Par exemple, si on pose la question : « l’usage de la violence rend-elle l’action politique plus efficace ? ». Eh bien on aurait tendance à répondre que parfois oui, parfois non, cela dépend du type de moyen utilisé, de votre définition de ce qui est violent, de ce qui fait qu’une action sera considérée comme efficace ou non.

Donc si la question est de savoir comment mettre en place une lutte efficace contre le fascisme, il faut d’abord prendre en compte la tactique que l’extrême droite met en place pour se rendre banale aux yeux des personnes non-averties. Le fascisme a mis en sourdine les saluts hitlériens et le discours racial décomplexé et table principalement sur la confusion politique pour se rendre attirant (utilisant aussi bien les espaces numériques qu’urbains pour devenir plus fort).

La tactique traditionnelle de la confrontation en rue peut donc être efficace mais elle n’est plus la méthode qui permettra de répondre aux nouvelles formes militantes du fascisme. Car, au delà des problèmes d’images ou d’organisation interne que peuvent générer le folklore et l’entre-soi militant (et parfois viriliste), certaines personnes considèrent que des groupes comme Vinci sont plus dangereux que le groupe local de néo-nazis du coin, d’une part parce qu’il possède un plus grand pouvoir de nuisance et d’autre part parce qu’il nourrit une violence répressive (celle du capital et de ses vigiles armés) qui d’une certaine manière peut faire progresser le fascisme avec bien plus d’efficacité que le groupe local de skinheads-fachos.

« Vinci hors de nos vies » – Nique Toulouse Nécropole » – « Vinci dégage ! »

D’autres pourront répondre qu’on peut se battre contre ces deux expressions du fascisme, en confrontant à la fois l’autoritarisme des classes dirigeantes et à la fois le fascisme à petite échelle. Mais surtout il ne faut pas passer à côté du fait que les petits groupes de fascistes peuvent avoir un impact sur la politique à travers les médias grand public.

Vous avez par exemple sans doute entendu parler de l’attaque de Charlottesville : « Ville étudiante, multiculturelle, Charlottesville, située dans le Sud conservateur des États-Unis, a été le théâtre d’une importante manifestation rassemblant l’extrême-droite américaine, des néo-nazis aux membres du Ku Klux Klan. Un des membres de ces mouvances racistes a foncé dans une foule d’opposants, et a tué l’un d’entre-eux. » (dixit le journal Les Inrocks). En réalite c’était l’unE d’entre-eux, elle s’appelait Heather Heyer.

Pourtant la manifestation en question et l’attaque qui a suivi était à l’échelle d’une ville des États-Unis inconnue pour la plupart jusqu’alors. Hitler a commencé avec 45 hommes, Mussolini, lui avec juste une centaine. On peut donc en déduire qu’il vaut mieux tuer le fascisme à la racine avant qu’il ne prenne dans le bon terreau.

Enfin, pour bien comprendre comment et pourquoi l’antifascisme doit s’organiser, il est primordial de comprendre ce qu’est le fascisme :

L’extrême droite : portrait

La question fréquente qui vient lorsque l’on se décide à mettre en œuvre des actions directes contre le fascisme, c’est « comment est-ce qu’on décide qui est fasciste ? ».

En fait, il y’a deux manières de poser cette question. La première programme notre impuissance politique et la deuxième est un tremplin qui nous permet de réfléchir et d’agir.

Souvent on entend la question suivante prononcée d’un ton ironique « Mais QUI décide de qui est fasciste ??? ». Ce qui implicitement veut dire que personne n’est autorisé·e ou habilité·e à décider de qui est fasciste. Et donc que l’on ne devrait pas (voir que l’on ne peu pas) décider de qui est fasciste.

Ce qui revient à dire que toute action antifasciste est inutile voir illégitime. La raison pour laquelle cette manière de poser la question nous rend impuissant·e·s est donc qu’elle nous empêche de proposer une réflexion, elle nous empêche d’apprendre collectivement quoi que ce soit. Elle met un terme à la conversation, et par là même, est bien pratique pour les fascistes qui rêvent d’un monde où plus personne n’est habilité·e à les dénoncer.

Projection

Les personnes qui posent cette question nous demandent en fait de donner une sorte de formule abstraite englobant tout ce qui est fasciste et nous permettrait à coup sûr de savoir qui l’est et qui ne l’est pas. Ce qui ne marche pas bien avec la manière dont aujourd’hui l’antifascisme s’organise : localement, de manière particulière à chaque contexte et donc flexible (on parlera plus précisément de l’extrême droite moderne dans un autre dossier).

La manière plus productive pour poser cette question serait donc : « Comment faisons-nous pour décider de qui est fasciste ? » et utiliser cette question comme une façon de mieux connaitre la fascisme pour mieux le dénoncer quand on le voit. C’est donc comme ça qu’on va poser la question.

Le mot « fasciste » est souvent utilisé pour désigner une personne faisant preuve d’autoritarisme (imposer par l’autorité) ou d’agressivité. Mais cet usage ne nous aide pas car il permet aux personnes de créer une fausse équivalence entre l’autoritarisme de Lénine et celui d’Hitler. Entre l’agressivité d’un groupe de Gilets Jaunes à l’égard de Macron et l’agressivité d’une bande de néo-nazis à l’encontre d’une femme voilée dans la rue.

Anti-FN-11nov-1-1024x448

Pour le cas Lénine/Hitler, même si les deux régimes sont effectivement autoritaires, ils se sont constitués de manières très différentes et pour des raisons tout aussi différentes. En réalité, un seul de ces deux régimes peut être factuellement qualifié de fascisme.

Depuis que le fascisme existe (environ 100 ans), ce dernier s’est formalisé en différentes variantes. Mais essentiellement le fascisme s’incarne dans des idées conservatrices (ou réactionnaires) dont le but est à la fois d’entretenir une version mythifiée du passé où les choses allaient bien mieux et à la fois restaurer une gloire perdue pour créer un futur meilleur.

En général, le fascisme est caractérisé par :

  • Moins de démocratie (donc de liberté politique de publier, se rassembler, avoir de l’impact sur les décisions politiques) ;
  • Plus de dictature (donc d’autoritarisme, de parti unique, de totalitarisme) ;
  • Une vision très pro-police et pro-armée ;
  • Une façon de concevoir la politique par la domination, la conquête et l’impérialisme ;
  • Une logique étatiste et particulièrement dans des voies qui encouragent le discours nationaliste et patriotique, souvent dans une logique xénophobe voir ethnodifférentialiste ;
  • Une pensée viriliste avec la conception d’hommes hétérosexuels, cisgenres, dominant par la violence et réprimant leurs émotions ;
  • Une absence totale de remise en question du capitalisme avec lequel il partage un anti-communismeassumé ;
  • Un racisme violent (le plus souvent contre les personnes non-blanches : en France ce sont notamment les personnes assimilées aux cultures « arabes/musulmanes », « israélites » ou « africaines » qui en sont les cibles).
    L’historien Robert Paxton donne une bonne définition du fascisme. Il dit que c’est (attention longue phrase) : « une tendance politique marquée par une préoccupation obsessionnelle pour le déclin, la fragilité, ou l’humiliation de sa communauté, compensant cela par un culte de l’unité, de l’énergie et de la pureté, dans lequel un parti de masse de militants nationalistes engagés travaill[e] difficilement mais efficacement avec les élites traditionnelles à l’abandon des libertés politiques, [met] en œuvre des violences salvatrices sans aucunes barrières éthiques ou légales qui restreindraient les épurations internes et les expansions externes ».
Robert Paxton

La question de « collaboration […] avec les élites traditionnelles » est ici une notion importante. On imagine souvent le fasciste comme un jeune déscolarisé ou un ouvrier skinhead mais cette image est en fait rétrograde.
Comme nous le verrons dans un autre dossier, les fascistes d’aujourd’hui sont éduqué·e·s (iels maitrisent la culture bourgeoise), appartiennent à toutes les classes sociales, et ont un discours bien fait (politesse, calme, rhétorique, etc.).

Quiconque respecte certains des critères présentés plus haut n’est pas nécessairement un·e fasciste. Pour autant les fascistes savent comment paraitre pour ce qu’ils ne sont pas. Ils peuvent vous tromper avec des phrases type « on ne peut pas être fasciste, on a un noir/homo parmi nous ! » (même veine que « je ne suis pas raciste, j’ai un ami noir » ou « je ne suis pas sexiste, j’ai une femme, une mère et une sœur » ).

Il est important de noter que le fascisme n’est pas en tout point différent des régimes dans lesquels nous vivons. Le fascisme n’est pas mort en 1945. Par exemple, Trump coche un grand nombre de cases citées plus haut. De la même manière, l’administration Reagan ou Thatcher a été tellement complaisante avec le fascisme qu’elles ont soutenu le régime fasciste de Pinochet (Chili) ou celui de Efraín Ríos Montt (Guatemala) par l’envoi d’armes et d’argent.

Efraín Ríos Montt et Ronald Reagan

De la même manière, on a pu rapprocher les régimes fascistes (qui se fondent sur une violence raciale très dure) avec les anciens régimes coloniaux (et tout autant que les néo-coloniaux). Et comme on l’a déjà explicité, les sociétés libérales aidant à l’émergence du fascisme, c’est donc graduellement que ce dernier s’installe. Le fascisme, ce n’est pas tout ou rien. Comme la plupart des phénomènes politiques, on les analyse comme des processus complexes.

Mais tout cela ne répond pas à la question : comment identifier les fascistes et les distinguer de conservateurs traditionnels. Le problème c’est qu’auparavant, les fascistes revendiquaient leur appartenance et leur idéologie. Aujourd’hui, le mot a pris une connotation si négative (suite notamment aux différentes dictatures fascistes et à leurs bilans à travers l’histoire) que les gens ont tendance à ne plus s’en revendiquer quand bien même ils sont d’accord avec le contenu idéologique du fascisme. Les fascistes diront qu’iels ne sont pas fascistes tout comme les racistes disent qu’iels ne sont pas racistes et comme les sexistes disent qu’ils ne sont pas des sexistes. Personne n’a envie d’être le méchant de l’histoire.

Si nos actions antifascistes ciblent uniquement les personnes qui s’affichent ouvertement comme étant fascistes, les plus dangereux·ses nous échapperaient. Mais quoi qu’il en soit, si vous apprenez les caractéristiques du fascisme présentées plus haut et que vous gardez bien à l’esprit que les fascistes avancent masqué·e·s, vous serez plus à même de reconnaitre le fascisme quand il se répandra dans les idéologies et les discours auxquels vous serez confronté·es.

Mais, même si nous connaissons les idées au fondement du fascisme, vous pourriez argumenter, à juste titre, que sonder le cœur et l’âme d’une personne pour savoir si elle est vraiment fasciste dans sont for intérieur est une tâche difficile (voire impossible).

LHFred Williamson

En effet, comment savoir si une personne est véritablement convaincue par une cause politique, ou si elle tient des postures symboliques pour le folklore, ou encore si elle se laisse juste happer par la masse, ou même si elle ne ferait pas du « second degré » ? Ainsi la question la plus intelligente à poser ne serait pas « qui est fasciste ? » mais « qui fait du fascisme ? ».

Qui, dans une communauté, construit une idéologie fasciste, répand des idées fascistes dans des lieux ou l’on pourrait s’y opposer collectivement ?
Si nous connaissons les idées fondamentales du fascisme, il est plus facile de dire si quelqu’un les propage (de manière ironique ou non, de manière consciente ou non, quel que soit son objectif).

Pour les antifascistes, c’est donc moins une question de savoir si une personne est une bonne ou une mauvaise personne, mais plutôt de connaître les effets de la propagation de ses idées. Quel sera l’impact politique de ses actions ?

Ceci étant dit, l’erreur est toujours possible et les groupes antifascistes en sont conscients, c’est l’une des raisons pour lesquelles ces groupes s’organisent à échelle locale, de manière décentralisée et flexible.

Fasciste et antifasciste = même combat ?

Bref, maintenant que vous connaissez les points essentiels de ce qui fonde le fascisme, vous devriez repérer facilement une erreur assez commune en la matière : des personnes construisent souvent une fausse équivalence entre le fascisme et l’antifascisme. Vous avez déjà entendu des personnes dire que les deux groupes sont en réalité bien proches, ou que, si vous combattiez le fascisme avec « violence » ou « censure », c’est en réalité vous le ou la vrai·e fasciste dans l’histoire.

On rappellera également la fausse citation de Churchill qui aurait dit que « les antifascistes d’aujourd’hui sont les fascistes de demain », qui est reprise très souvent sur les réseaux sociaux, ou encore par des idéologues sur les plateaux TV.
De la même manière, fleurissent les attaques sur le fait que des personnes qui organisent parfois leur lutte de manière masquée sont, d’une part, identiques (aux fascistes), et, d’autre part, forcément mal intentionnées.

Un youtubeur anglophone très sympathique appelle cette logique l’approche « John Jonah Jameson » du nom du personnage fictif présent dans le monde de Spider-Man. Éditorialiste et patron de presse qui ne cesse de mener campagne contre les super-héro·ïne·s, souvent au prétexte que ces dernier·e·s porteraient un masque alors que, au même titre que les antifascistes en manifestation, iels gardent l’anonymat pour se protéger et protéger leurs proches.

Un super-héros masqué ? C’est sûrement un lâche qui cache quelque chose !

Maintenant que vous savez ce qu’est le fascisme vous pouvez donc comprendre en quoi cette équivalence est fausse :

  • Les antifascistes sont pour la plupart anti-militaristes, anti-répression, pro-solidarité, anti-capitalistes, pro-féministes, antiracistes, etc.
  • Les fascistes sont pour la plupart pour la violence étatique, capitalistes, nationalistes, virilistes et racistes.

Vous pourriez entendre des personnes expliquer que les nazis étaient de gauche car on trouverait « socialisme » dans le « national-socialisme ».
Cependant ces mêmes personnes ont tendance à oublier que c’était une ruse délibérée :
le socialisme (entendu comme contrôle de l’économie par les travailleurs et donc interchangeable avec le mot « communisme ») occupait une grande place dans l’Allemagne des années 20 et représentait la principale opposition au nazisme.

PavlosBrest
Brest
VOUS VOYEZ ??? C’EST PAREIL !

Le parti d’Hitler a donc détourné la rhétorique socialiste pour paraitre plus de gauche et donc plus dans l’air du temps. Mais dès que les Nazis furent au pouvoir, ils bannirent les syndicats et privatisèrent de larges segments de l’économie allemande, ce qui est à l’opposé d’un projet socialiste.

C’est sans compter que l’Allemagne nazie a mis toute sa propagande à l’œuvre pour faire passer le message que le socialisme était en réalité un complot juif (judéo-bolchevisme) pour contrôler le monde, tandis qu’à de nombreuses reprises dans Mein Kampf (son livre), Hitler condamne le socialisme sans aucune ambiguïté.

Autre différence de taille, tandis qu’un·e socialiste analysera la société en termes de classes sociales et de rapports sociaux (Marx étant l’un des fondateurs de la sociologie) tandis qu’un·e nazi·e (comme tout·e autre fasciste) analysera la société sous l’angle du peuple identitaire (« volk« , sous-entendu : blanc, aryen, hétérosexuel, etc.).

Pour toutes ces raisons, les Nazis exécutèrent en masse des socialistes d’Allemagne ou d’ailleurs. Vous avez déjà sans doute vu passer le fameux poème de Martin Niemöller, survivant des camps de concentration expliquant que « d’abord les nazis sont venus chercher les communistes […] ».

PavlosBrest3
Brest

Un autre piège utilisé par les fascistes aujourd’hui est de dire que leur idéologie n’est pas raciste car Mussolini (fondateur du fascisme) ne l’était soit-disant pas. Cette technique est utilisée depuis les années 80 afin de rendre le fascisme acceptable en séparant le bon (Mussolini) du mauvais (Hitler).

En réalité, dés les années 20, les fascistes italiens répétaient la propagande suprémaciste blanche et produisaient un discours antisémite promettant à la fois des lois restreignant la liberté des juifs et à la fois des camps de concentration.

Fasciste ou capitaliste ?

Au début du XXème siècle (les années 1900), le socialisme et l’anarchisme social (deux courants du communisme) étaient des forces politiques majeures et pas seulement en Europe. En particulier après la Commune de Paris (1871) et la Révolution russe (1917), beaucoup de personnes, de partis politiques, d’organisations et de syndicats avaient pour espoir que le capitalisme (avec les mauvaises conditions de travail, l’injustice, la guerre, la maladie et la pauvreté qui sont arrivées avec l’industrialisation) tomberait un jour ou un autre.

O__Djellil_et_J_M__Le_Pen
Omar Djellil et son grand copain Jean-Marie Le Pen.
Barricade de Communards

Et beaucoup de groupes de gauche au XXème siècle incluant des marxistes ont vu les premiers groupes fascistes arriver et ont considéré qu’il s’agissait de l’arrivée de mesures plus agressives vers lesquelles se réfugiaient les riches capitalistes pour continuer à garder les travailleurs sous contrôle et les exploiter tout en les empêchant de construire le communisme.

Et dans une certaine mesure, iels avaient vu juste : beaucoup de libéraux·les et de capitalistes (propriétaires d’industrie ou de grandes fortunes) de cette période ont soutenu le fascisme car justement, cette idéologie était un très bon bouclier contre l’action communiste et/ou anarchiste.

Mais ce que n’ont pas prévu ces mêmes marxistes, c’était l’importance de la dimension raciale et viriliste qui se propagerait à travers le fascisme. Les fascistes ne collaboraient pas simplement avec les riches capitalistes pour garder les travailleur·se·s à leur place : iels divisaient les travailleur·se·s sur des lignes raciales et nationales (et les faisant donc se battre entre eux·lles au lieu d’opérer une lutte contre la classe dominante).

Et c’est la raison pour laquelle encore aujourd’hui, les communistes et anarchistes ne s’entendent pas du tout avec les fascistes qui, eux, préfèrent échanger avec les libéraux. Libéraux comme Charles Beigbeder qui, actif au sein du MEDEF (le groupe d’intérêt du grand patronat français) et œuvrant pour la banalisation de l’extrême droite auprès du patronat, affirmait déjà en juillet 2015, : « je n’hésiterais pas une seconde et n’aurais aucun état d’âme à soutenir le FN ». Et en effet on sait que récemment, Marion Maréchal Le Pen a été invitée à l’Université d’été du MEDEF tandis que Beigbeder aurait aidé cette dernière à lever des fonds pour financer l’ISSEP à Lyon (une université privée voulant imposer une hégémonie culturelle de droite réactionnaire). Il est également actionnaire du site Atlantico et a participé a la création de la revue passerelle l’Incorrect, dont il est l’un des principaux actionnaires.

Charles Beigbeder et sa super cravate

Pour revenir aux combats et aux luttes antifascistes, il y a une notion qui fait systématiquement débat autour de ces questions : la violence.

Violence : stratégie et représentations

En effet, une autre fausse équivalence que l’on dresse souvent entre fascistes et antifascistes postule que si les deux utilisent des méthodes violentes, alors les deux groupes sont « mauvais ».

Nous avons déjà vu que l’action antifasciste n’est pas exclusivement violente et cible ceux qui construisent le fascisme activement. A l’inverse, nous verrons plus loin en quoi le fascisme contemporain est véritablement génocidaire dans ces ambitions.

Ainsi, la première raison pour laquelle cette équivalence est fausse repose sur le fait que l’échelle de la violence déployée sur la table n’est pas du tout la même. On parle bien de de différencier des petites actions groupées antifascistes contre des personnes, les fascistes, qui souhaitent assassiner toute une partie de la population.

Libéral·e aveugle : illustration

Pourtant, de nombreuses personnes soutiennent que la violence n’a pas sa place en politique. Ce qui leur permet, entre autres, de critiquer l’antifascisme non pas sur la base de son idéologie mais sur la base des tactiques violentes qu’il n’exclut pas d’employer.

Mais cette idée selon laquelle la violence n’a pas sa place en politique est fausse. D’ailleurs, y répondre va permettre de mettre en avant quelque chose de très intéressant qui n’est pas souvent relevé lors de ce genre de débats : La violence occupe déjà chaque espace politique.

La politique, c’est globalement la question de la gestion du pouvoir et des rapports de force. Le pouvoir est maintenu dans une grande mesure par la violence. Par exemple les pouvoirs dit « régaliens » qui sont la police, l’armée et la justice sont des formes de violence contrôlées par l’Etat pour servir le capitalisme néolibéral.

De la même manière chaque frontière implique l’usage de la violence pour la maintenir, tout comme le capitalisme fait peser sur nous la peur du licenciement, du chômage et de la pauvreté pour nous motiver à aller travailler.

On parle bien de FORCE de police et non pas de VENEZ-ON-SE-POSE-ET-ON-EN-DISCUTE de police.

Petit débat sympathique entre gentil policier et… des cyclistes ? Visiblement ?

La politique dans son ensemble mobilise la violence, que ce soit pour maintenir le statu quo ou pour renverser ce dernier.

Mais ce qu’on appelle violence dans le langage commun, c’est en réalité le moment où survient une violence qui nous parait illégitime quand bien même elle répond à une violence qui, elle, ne nous apparait pas comme violente car normalisée. C’est la raison pour laquelle BFM TV peut titrer sa vidéo sur les rassemblements de janvier 2020 : « Manifestations : le retour de la violence ? » comme si la violence avait quitté l’espace politique le temps des fêtes.

De la même manière, 20 minutes titrait il y a peu « Mayotte : Des violences éclatent après la mort d’un homme tué par un policier ».
En fait, les violences interviennent pour le journaliste seulement après la mort de l’homme en question. Car la police tuant un homme est vue comme une expression légitime et normale de la violence et donc ne sera pas décrite comme telle.

Ainsi, on voit bien que toutes les idéologies politiques légitiment la violence par et à destination de certains groupes précis. Mais même si c’est le cas, ça ne les met par sur un pied d’égalité en ce qui concerne ces choix idéologiques (qui peut user de violence et qui peut être la cible de cette violence).

Cela ne signifie d’ailleurs pas non plus que toute violence perpétrée au nom de l’antifascisme serait par définition légitime. Ce que cela signifie, c’est que dire qu’une forme d’engagement politique serait mauvaise car elle mobiliserait des tactiques violentes n’est pas suffisant. Car elles le font toutes.

En d’autres termes, si le fascisme et l’antifascisme sont équivalents parce qu’ils utilisent tous deux la violence, alors toutes les idéologies politiques sont équivalentes. Ce qui ne permet aucune analyse pertinente.

Par ailleurs, d’autres personnes comprennent tout à fait que toute idéologie politique implique en pratique de la violence mais critiquent les antifascistes car elles pensent que c’est l’Etat qui doit détenir le monopole de la violence.

Ainsi, bien que la police et l’armée soient des agents de la violence d’Etat, ils travaillent pour ce dernier et donc idéalement dans une démocratie libérale, l’Etat, incarné par le gouvernement, représente le peuple.

C’est peu ou prou ce qu’expliquait le philosophe Thomas Hobbes (grande figure de l’émergence du libéralisme) pensant que le gouvernement devrait se fonder sur le pouvoir donné par le peuple à une entité souveraine absolue et qui, en échange, promettrait de maintenir la paix et l’ordre.

manif_Tours_11-11
Hobbes

C’est une logique que vous pourriez défendre mais les antifascistes auraient alors quelques questions à vous poser. Iels pourraient vous demander si les gouvernements modernes représentent un idéal de responsabilité démocratique. Ou arguer que « la paix » et « l’ordre » sont des termes très relatifs, en particulier l’ordre, qui, rappelons-le, est systématiquement maintenu par la violence, est un ordre qui bénéficie aux riches, aux hommes cisgenres hétérosexuels, aux blanc·he·s, etc.

Si iels sont anarchistes, iels pourront aussi nier le fait que l’Etat doit détenir ce monopole et enfin, pourront surtout rappeler que cette volonté de ne permettre qu’à l’Etat de mobiliser la violence bénéficie avant tout aux fascistes, en leur laissant l’espace politique suffisant pour grandir.

« Les extrêmes se rejoignent »

Mais l’utilisation de la violence comme tactique permet aussi à de nombreuses personnes de dresser une fausse équivalence entre l’extrême droite fasciste et l’extrême gauche antifasciste.

Pourtant il y a un gros biais dans ce raisonnement et pour en parler je vais devoir vous parler d’une pièce de théâtre : « A la frontière » de W. H. Auden et Christopher Isherwood.

Dans cette pièce antifasciste, un riche industriel, nommé Valérian met son pouvoir au service d’un dictateur fasciste en lui fabriquant des armes.

Euskal Herria antifaxista_logo

Au point culminant de la pièce, le dictateur est renversé par son peuple qui tue également Valérian. Mais juste avant cela il y a une scène cruciale ou l’ami de Valérian vient le prévenir que la révolution a commencé et que c’est la fin du régime, qu’il faudrait donc mieux tout abandonner et fuir ensemble. Ce à quoi Valérian répond « non ». Il choisit de rester et de donner son argent, non pas au peuple révolutionnaire mais aux fascistes.

C’est ce choix qui distingue Valérian des victimes du gouvernement fasciste qu’il soutient. Ce choix illustre une chose : si vous êtes fasciste (que donc vous participez activement construire/maintenir le fascisme) et que les antifascistes viennent à vous, vous avez un choix.

Vous pouvez abandonner , renoncer à ce que vous avez dit ou fait, faire amende honorable si c’est encore possible, vous retirer et retourner à votre vie sans participer à des actions fascistes.

Certes, les antifa ne deviendrons pas vos meilleurs amis mais iels passeront à autre chose. Les sources historiques (compilées entre autres dans le livre de Bray) vont dans le même sens : lorsque les fascistes locaux abandonnent l’idée de se réunir, les antifascistes on tendance à retourner également à leurs vies. En fait, certain·e·s antifa vont jusqu’à mettre en place des dispositifs pour aider les ex-fascistes à quitter leur mouvement pour qu’iels puissent retourner dans la vie normale.

Mais si vous êtes juif·ve, ou noir·e, ou homosexuel·le, ou trans ou encore handicapé·e et que les fascistes viennent à vous, vous n’avez pas le choix. Il n’y a rien que vous puissiez dire ou faire qui les contentera car c’est votre existence elle-même qui est pour eux le problème. Les sources historiques vont dans le même sens, chaque concession faite aux fascistes au XXème siècle n’a fait que les rendre plus sûrs d’eux.

C’est une différence clé entre la stratégie fasciste et antifasciste : les antifa contre ceux qui participent activement au fascisme, pas ceux ayant des sympathies fascistes dans leur vie privée ou des idées fascistes tout au fond de leur tête, mais bien ceux qui font le choix de participer à la montée du fascisme publiquement.

Si vous êtes un·e ennemi·e politique de l’antifascisme vous pouvez cesser d’en être un·e. Si vous êtes un·e ennemi·e politique du fascisme, soit vous gagnez, soit vous mourrez.

Dossier réalisé à l’aide du livre de Mark Bray, « Antifa : The Anti-Fascist Handbook » et de la vidéo de Philosophy Tube « The Philosophy of Antifa ».


Merci à GaucheDeCombat pour sa correction orthographique, ainsi que pour son article commentant ce dossier.

Notes

[1NDLR : précisons au passage que, justement, Churchill n’a jamais prononcé cette phrase, qui est une pure invention et n’a jamais été prononcée par une quelconque personnalité. Certains l’attribuent, là encore par erreur, soit à Halford E. Luccock ou encore à Huey Pierce Long, gouverneur populiste de Louisiane dans les années trente : dans ce dernier cas, l’écrivain Robert Cantwell qui avait prétendu l’avoir entendu prononcé cette phrase, a finalement avoué l’avoir inventé…