Depuis quelques semaines, le documentaire complotiste "Hold-Up" agite le web et gagne en viralité un peu plus chaque jour. Alors qu’il est probable qu’il touche au final plusieurs millions de personnes, il nous semblait important de dire un mot sur ce film qui cumule un grand nombre de contre-vérités à propos de la crise actuelle et qui reprend également des discours portant la marque de l’extrême-droite. Pour nous aider à y voir plus clair et lutter contre cette épidémie de théories du complot, le site Le Poing nous propose un article à ce sujet. Voici un extrait.
“A qui profite le crime ?” Un discours qui penche bien à droite
Derrière le propos critique envers les multinationales véreuses et les Etats autoritaires qui ne pensent qu’à s’enrichir dans une mondialisation effrénée, on pourrait presque y trouver une analyse anticapitaliste. Mais celle ci est plus romantique que matérialiste, et se base sur des abstractions métaphysiques niant toute la complexité des systèmes de dominations (c’est : élites contre les pauvres gens, le peuple éclairé contre une oligarchie corrompue). Et si on pousse l’analyse du discours plus loin, on y retrouve tous les éléments centraux des théories conspirationnistes d’extrême droite. Le raisonnement purement manichéen se poursuit dans une opposition claire entre science et nature : selon le film, le virus a été crée par l’homme -donc par la science-. C’est la nature qui nous a sauvé du virus car il serait lui-même devenu moins dangereux en mutant, se débarrassant des souches de malaria que l’institut pasteur lui aurait inoculé (ouioui, tout à fait, on a plus qu’à remercier le bon dieu de nous avoir sauvé la mise).
Même chose pour la critique de la 5G ou du transhumanisme : ce n’est ni l’impact environnemental que ces technologies pourraient avoir ou la question de qui possède les moyens de productions qui gênent les intervenants du film (questions qu’il faudrait pourtant se poser). La critique porte essentiellement sur une utilisation fantasmée de ces technologies qui seraient en rupture avec une éthique religieuse. Ce discours anti-science récurrent dans l’extrême droite se double d’un autre aspect bien connu des conspi de la fachosphère : le complot juif. En effet, Rockfeller et la CIA -cités comme acteurs du “great reset” dans le film- sont des cibles qui reviennent souvent dans les théories du complot dont la thèse est que les juifs sont une élite qui dominent le monde en secret. (On retrouve également cette rhétorique chez Soral, Dieudonné, ou plus récemment chez le rappeur Freeze Corleone que nous citions en introduction).
Là où le bat blesse, c’est quand des gens qu’on pense être des alliés viennent donner du crédit à ces thèses en comparant le COVID à l’holocauste (Oui Monique, on ne s’en remet pas). Ce discours produit un double effet : une minimisation du génocide juif au profit d’un autre, qui serait actuellement orchestré par nos élites (juives, du coup). Cet inversement des faits et des valeurs est au centre de la doctrine négationniste et néo-nazie. Attention, nous ne disons pas ici que Monique Pinçot-Charlot est une néo-nazie, mais cette assertion dans un film complotiste produit un discours qu’on peut clairement assimiler à de l’antisémitisme voilé.
Ne manquait à ça que des affabulations sur la pédophilie pour que le film réussisse à caser toute les fantasmes qui nourrissent les théories complotistes d’extrême-droite (les réseaux pédo-satanistes, c’est bien ça dont on parle ici).Quand une intervenante parle des effets néfastes du confinement elle évoque des chiffres surestimés sur les viols d’enfants en en évoquant “12 000 par jours”, soit près de 4 millions par ans. Or, les décomptes réalisés par des associations de protection de l’enfance parlent de 160 000 viols par an, bien que ces chiffres soient difficiles à établir.
Cette lubie de l’extrême droite pour la pédo-criminalité se retrouve récemment dans les théories et le mouvementQanon. Né aux USA et importé en Europe pendant la crise du coronavirus, la thèse de cette théorie du complot serait que Donald Trump serait actuellement le dernier rempart contre un immense réseau pédo-sataniste contrôlé par la CIA et d’autres magnats de la finance et des nouvelles technologies (avec un fort relent de racisme et d’antisémitisme). Et Justement, Donald Trump est évoqué dans le film comme le seul qui n’adhérerait pas à la grande machination du“Great reset”. Bingo, ou plutôt… kamoulox.En clair, ce film regorge de tous les éléments constituant la matrice de toutes les théories du complot d’extrême droite, Mais là où il fait fort, c’est que ces éléments sont savamment distillés au milieu de constats que partage tout un chacun. Pas étonnant, quand on se rappelle le pedigree des intervenants. Encore moins étonnant de voir l’Action française (groupuscule d’extrême droite royaliste et antisémite) partager la promo du film sur son site internet.
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