Communiqué de Juives et Juifs Révolutionnaires suite à l’attentat antisémite de Pittsburgh aux Etats Unis, qui a causé la mort de 11 personnes :
Ce samedi 27 octobre 2018, un militant suprémaciste blanc a ouvert le feu à l’occasion d’une cérémonie de circoncision dans la synagogue de Pittsburgh. Le bilan de cet attentat terroriste s’élève d’ores et déjà à 11 morts .
Nos pensées vont aux victimes et à leurs familles
L’auteur de ce massacre antisémite, Robert Bowers partageait la théorie du « grand remplacement » propagée par les milieux néo-nazis et leurs relais selon laquelle l’immigration serait un complot juif visant à remplacer les blancs. Robert Bowers a crié « All Jews must die »(« touTEs les juifs/ves doivent mourir »).
La synagogue de Pittsburgh accueillait le samedi qui précédait une activité de solidarité avec les migrants. Au sein de la minorité juive d’Amérique, il existe une longue tradition progressiste. La conscience d’une l’histoire juive faites de migrations forcées explique l’implication d’une part importante de la minorité juive dans des actions de solidarité.
Cet attentat s’inscrit dans une montée en puissance du terrorisme suprémaciste blanc aux Etats Unis et dans le monde, qui s’en prend aux minorités et à celles et ceux qui s’opposent à son idéologie.
Ce terrorisme est systématiquement minimisé, et ses auteurs psychiatrisés afin de lui enlever toute dimension politique. Il est l’expression la plus aboutit d’un système raciste qui organise l’oppression des minorités nationales et les désigne comme cible. La victoire de Trump lui a donné une nouvelle vigueur et un espace politique, ce qui a eu pour conséquence la multiplication des violences contre les noirEs, les latin@s, les juifs/ves, les musulmanEs…
Souvenons nous du massacre raciste de l’Église de Charleston en 2015, au cours duquel le terroriste suprémaciste blanc Dylan Roof a assassiné des personnes noires. Cette semaine encore, Gregory Bush, a assassiné deux personnes noires : Vickie Lee Jones et Maurice E. Stallard, dans le Kentucky. Ce double meurtre intervient après que le tireur, blanc, ait tenté de pénétrer dans une église majoritairement noire. Le caractère raciste de l’attaque paraît donc difficilement discutable. Les meurtres commis par les suprémacistes blancs aux Etats-Unis ont doublé en 2017, rendant ceux-ci responsables de plus de la moitié des 34 décès liés aux attaques terroristes sur le territoire US au cours de cette année
La montée en puissance de mouvements fascistes partout dans le monde ne peut qu’avoir le même effet : explosion du racisme et de l’antisémitisme. Ce dernier a en effet une fonction clé dans la vision du monde nationaliste, qui diffère des autres formes de racisme dans lesquels les personnes racisées sont vues avant tout comme des concurrents : les juives et juifs sont ainsi vu non pas comme des concurrents dans la « lutte des races » qui tient lieu d’explication du monde à ces courants, mais comme les dominants contre lesquels il faudrait se révolter.
L’antisémitisme permet ainsi de substituer une explication raciale à une explication matérialiste du monde et de la politique. Alors que l’explication matérialiste du monde constate que celui-ci est fait de rapports de force entre classes, d’intérêts économiques et sociaux, la vision raciste considère que la réalité est le produit d’un complot menée par la minorité juive . Celle vision substitue ainsi la lutte des classes la lutte des races, en présentant « les blancs » comme dominés, effaçant ainsi au passage le caractère suprémaciste blanc du système en place, les rapports de classes et le rôle de la bourgeoisie impérialiste dans le maintien de l’ordre capitaliste.
Ce massacre apporte un démenti à celles et ceux qui, y compris au sein de la minorité juive, minimisent la profondeur de l’antisémitisme dans les sociétés occidentales et ne voient dans l’antisémitisme blanc qu’une réminiscence du passé amené à disparaître. Les larmes de crocodile de Netanyahu ne doivent ainsi pas nous tromper, lui qui dénonce le massacre alors qu’il a cautionné dès le début la politique de Trump contre les minorités et sa tolérance avec les antisémites, comme il le fait avec Orban et d’autres antisémites sous prétexte qu’ils soutiennent la politique de son gouvernement en Israel.
Cet attentat apporte aussi un démenti sanglant à celles et ceux qui voient les juifs et les juives comme partie prenante du suprémacisme blanc, alors que l’antisémitisme est précisément la racialisation des juives et des juifs et leur désignation comme corps exogène au sein de la société blanche.
Face à la violence des suprémacistes blancs, la solution n’est ni le déni, ni le replis nationaliste, ni la confiance naive dans des institutions d’état : elle passe par l’autodéfense, le renouveau d’une lutte antiraciste déterminée et des luttes sociales permettant de remettre l’affrontement de classe au coeur de la société, et ainsi revisibiliser la bourgeoisie comme classe dominante réelle que l’idéologie raciste masque en désignant les juives et juifs comme boucs émissaires des problèmes sociaux.