« La fête oui, mais les nazis, non merci »
Environ 1000 personnes se sont rassemblées le samedi 6 juillet à Gera (Allemagne, Thuringe) pour protester contre un concert en plein air de rock d’extrême droite « pour l’Allemagne ». Avec 700 néonazis qui s’étaient déplacés pour l’occasion, le nombre de participants à cet événement d’extrême droite, organisé pour la onzième année consécutive, est resté constant par rapport à l’année dernière.
Dès le jeudi après-midi, les opposants aux néonazis avaient occupé le terrain situé devant la gare centrale de Gera pour y faire une sorte de camping de protestation car c’était précisément là que le festival en plein air devait avoir lieu. Mais dès le vendredi matin, ils avaient été délogés par la police. Après, pendant la construction de la scène, les antifas n’ont laissé aucun répit aux fachos : le collectif d’action de Gera avait en effet organisé pas moins de cinq rassemblements autour du terrain, et les antifascistes ont pu exprimer leur refus de cette initiative. Le samedi même, 700 personnes ont manifesté devant la gare contre les néonazis, et au rassemblement à la fin de la manif, ils étaient près de 1000 à crier en chœur des slogans avec lesquels alternait de la musique jouée bien fort.
De leur côté, les quelques 300 premiers visiteurs du concert en plein air ont dû se débrouiller sans l’actuel président régional du NPD de Thuringe, Patrick Wieschke, comme leur a expliqué sur scène son prédécesseur Frank Schwerdt. Ce dernier, vice-président du NPD au niveau fédéral et membre du conseil municipal de la ville de Erfurt (en Thuringe également) a profité de l’occasion pour faire la pub du NPD auprès d’un public choisi ( !) avant les élections générales. Pour motiver les femmes présentes dans le public, la Berlinoise Maria Fank, du Ring Nationaler Frauen (RNF, Cercle des Femmes allemandes) est venue au micro. Son discours a également dû plaire au public masculin, en particulier lorsqu’elle a polémiqué de façon haineuse contre les « tribus nègres » et les homosexuels, ce qui lui a valu davantage d’applaudissements que n’en avait récolté Wieschke.
Un groupe d’une trentaine d’antifascistes s’est chargé de faire un peu d’animation pendant le concert : ils sont venus poser devant les fafs et, sur leurs t-shirts, on pouvait lire, une fois qu’ils étaient les uns à côté des autres, « Faisons la fête sans nazis ». Les fachos ont essayé de faire la même chose, mais sans succès. Certains se sont même fait refiler des t-shirts de contre-propagande ! (voir ici) Après, quand ils n’entendaient pas les slogans et les rythmes de samba des antifas, les néonazis ont pu retourner derrière leur clôture pour écouter des groupes de rock d’extrême droite tels que Exzess, Stimme der Vergeltung (La voix de la représaille) et Lunikoff-Verschwörung (Conspiration Lunikoff).
Contrairement à ces dernières années, ce n’est pas une banderole du Thüringer Heimatschutz (THS), des rangs desquels sont sortis les membres de la cellule terroriste d’extrême droite NSU (Nationalsozialistischer Untergrund), qui décorait la scène. Et pourtant, même si la référence n’était pas ouvertement présente, on voyait un peu partout des boîtes appelant aux dons pour les « camarades emprisonnés » ainsi que des t-shirts portant l’inscription « Freiheit für Wolle », en référence à Ralf Wohlleben, soupçonné d’avoir soutenu les membres du NSU pendant leur cavale ou plus généralement à d’autres néonazis passés en procès pour violences ou qui purgent leur peine. Car la violence continue d’être le point central de l’idéologie d’extrême droite : on pouvait la lire sur les t-shirts du public : « On dit que Jésus marchait sur les eaux, je marche sur les cadavres », et l’entendre quand le groupe Frontalkraft a joué une chanson intitulée « Schwarz ist die Nacht » (Noire est la nuit). Tandis que le chanteur beuglait sur scène : « Noire est la nuit où nous vous aurons, blancs sont les hommes qui vaincront pour l’Allemagne, rouge est le sang qui coulera sur l’asphalte », le public chantait sans se tromper en levant le poing.
Le rock d’extrême droite continue donc de faire l’apologie du meurtre et du tabassage, et les événements comme « Rock für Deutschland » lui offrent une scène tout ce qu’il y a de plus légale.
Kai Budler, pour Publikative.org
Photos de Kai Budler
traduction et compléments d’infos par Tina