Des manifestations néonazies attirant des milliers de personnes et des chasses aux immigré.es ont choqué l’opinion publique allemande et internationale depuis le weekend dernier. Retour sur ces événements et comment l’extrême droite récupère un assassinat pour des fins politiques, quitte à rendre hommage à une personne métisse, tant par sa couleur de peau que par ses origines.
Les faits
La ville de Chemnitz en Allemagne, à quelques 200 km au sud-ouest de Berlin, était de fête lorsque dans la nuit du samedi 25 août, un homme fut poignardé au cours d’une altercation. Très vite, l’information fut relayée en ligne, mettant en exergue les nationalités des personnes impliquées dans la bagarre : la victime allemande et les agresseurs étrangers.
Pour le moment, le déroulé intégral des faits n’est pas encore connu. Toutefois, la police a démenti les rumeurs selon lesquelles l’affrontement était lié à l’agression d’une femme (que la victime aurait défendue face à des sauvages réfugiés). Il n’a été révélé, dans des circonstances encore peu claires, que deux suspects ont été arrêtés, en précisant bien sûr leurs nationalités syrienne et iraquienne. Ce fut malgré tout une occasion en or pour l’extrême droite de récupérer la mort et de lancer des manifestations qui dégénérèrent rapidement, prenant la police de court.
Manifestations
C’est ainsi que dimanche, un groupe d’hooligans d’extrême droite donna rendez-vous à leurs partisan.es en centre-ville, sous un imposant buste de Karl Marx, pour montrer « qui étaient aux manettes dans la ville ». Selon la BBC, une centaine de personnes se rassembla initialement sans affrontement, mais ce nombre grimpa à 800 par la suite et la manifestation dégénéra en pogromes.
En effet, beaucoup de sources, dont Deutsche Welle et un journaliste indépendant cité par Spiegel Online, font état de poursuites dans les rues et d’attaques envers des personnes d’apparence étrangère.
Lundi, une nouvelle mobilisation xénophobe rassembla cette fois-ci 6 000 personnes, selon la police. Face à eux.elles, 1 500 antifascistes se mobilisèrent à proximité. Quelques 600 policier.es les séparaient dans le calme jusqu’à 21 heures, heure à laquelle des projectiles furent lancés de part et d’autre. Plusieurs manifestant.es et policier.es furent blessé.es (source : la police allemande, citée par Deutsche Welle).
Manipulations de l’extrême droite
Tout comme en France et ailleurs, les fascistes allemands s’empressent de récupérer tout fait divers impliquant des suspects étrangers. Ce ne sont pas les violences envers les femmes ni les meurtres qui les dérangent, mais bien le fait que des migrant.es (ou des personnes perçues comme telles) soient impliqué.es. Or, dans le cas présent, la récupération se double de ridicule car la victime est elle-même issue de l’immigration.
En effet, cette personne était non seulement métisse mais ses parents sont d’origines différentes : une mère allemande et un père cubain, preuve s’il en fallait du bien fait de la rencontre des cultures. Malheureusement, ce détail fut largement ignoré (et le demeure toujours très largement, notamment dans les médias en France) alors qu’on s’empresse à surligner les nationalités des personnes impliquées dans la bagarre.
La BBC cite Nancy Larssen, une amie d’enfance de la victime, interviewée par Deutsche Welle, et qui dénonça comment les médias ont attisé la haine masquant les origines multiculturelles de la victime : « c’est triste que les médias se limitent à dire qu’un allemand est mort, et c’est pour cela que tous les néonazis et les hooligans sont sortis, mais les médias devraient décrire qui est mort, et quelle couleur de peu il avait, parce que je ne crois pas qu’ils feraient ceci s’ils le savaient ».
Un autre ami décrivait par ailleurs la victime comme étant de gauche, toujours selon la BBC. On ne peut qu’imaginer son dégoût s’il savait comment et par qui sa mort est instrumentalisée.
Soupçons de collusion entre l’extrême droite et la police
Les autorités allemandes ont vivement critiqué la police mercredi 29 août après la diffusion en ligne d’un mandat d’arrêt impliquant un étranger parmi les suspects. Non seulement ceci est illégal, sinon que ça servit de prétexte pour l’extrême droite pour lancer sa propagande et attiser la haine de la ville.
Le Monde informa jeudi 31 août qu’un gardien de la paix fut à l’origine de la fuite du document. Selon son avocat, il envoya une photo du document à un groupe local fasciste pour que « le public sache ce qui s’est passé » tout en dénonçant les « mensonges » des médias. Il passa lui-même sous silence, à l’instar de la presse si décriée par les siens, les origines métissées de la victime.
Qu’importe ? Tout est permis dans la manipulation fasciste et tout ce qui permet d’augmenter la haine entre les peuples est bénéfique pour ces vautours.
La Horde