Yannis Youlountas nous donne des nouvelles de Grèce, où nos camarades font face à une vague d’attaques fascistes de lieux et espaces autogérés. Lu sur Blogyy.net :
Bonjour,
Je vous écris depuis l’un des nombreux squats où nous faisons une étape ces jours-ci, avec deux des fourgons solidaires qui se déploient en Grèce en ce moment. D’autres fourgons sont en train d’arriver et nous rejoindront à Athènes à partir de lundi, puis durant tout le mois de mai, du Nord au Sud. Tant bien que mal, l’opération prévue a commencé et je vous en parlerai dans la deuxième partie de ce message.
1 – ALERTE ANTIFASCISTE
La première des nouvelles est d’abord l’offensive que nous subissons à nouveau de la part des fascistes. Depuis plusieurs mois, les attaques violentes se multiplient à nouveau, contre des camarades et contre des lieux. Simultanément, les menaces de mort recommencent contre certains d’entre nous, comme à l’époque d’Aube dorée, notamment contre ceux qui ont déjà été agressés par le passé.
Cette semaine, deux de nos lieux autogérés ont subi des attaques fascistes :
Ce lundi, le squat « Patmou kai Karavia » a été attaqué et vandalisé à Kato Patissia (centre d’Athènes, à 3 km au nord d’Exarcheia).
Ce mercredi, les fascistes ont également attaqué le squat « Jardin Botanique » à Petroupoli (quartier excentré au nord-ouest d’Athènes).
Le squat « Jardin Botanique » à Petroupoli, lieu où s’est déroulé la deuxième attaque fasciste de la semaine
Durant cette deuxième attaque de la semaine, les fascistes ont frappé juste après la tombée de la nuit, avec des cagoules, alors que le squat était encore en activité. Ils ont tout d’abord tagué des croix gammées et celtiques autour du bâtiment principal, ainsi que des slogans nationalistes, avant de pénétrer dans le hall d’entrée. À l’intérieur, dix des fascistes cagoulés se sont retrouvés nez à nez avec deux militantes antiautoritaires qui ont aussitôt donné l’alerte. Dans les locaux du squat se déroulaient alors un cours de danse et une répétition de théâtre. Il était environ 21h30.
Tout le monde s’est mis à rejoindre le hall à toute vitesse, alors que les fascistes proférait des insultes et des menaces de mort accompagnées de saluts nazis. Voyant le monde arriver, les fascistes se sont enfuit tout en jetant de gros pétards derrière eux.
Dans les minutes qui ont suivi, de nombreux membres du mouvement social ont convergé autour du squat « Jardin Botanique » pour essayer de retrouver les assaillants, mais sans succès : la pseudo race supérieure a préféré détaller dans la nuit, aussi vite que possible, en contradiction avec leur attitude prétentieuse et machiste à leur arrivée, devant les deux militantes antiautoritaires 😉
Précisons que le « Jardin Botanique » de Petroupoli n’est pas un squat comme les autres. Il est très grand, avec une immense cour intérieure (qui nous a déjà été prêtée pour garer nos plus grands fourgons durant des convois passés) et parmi ses bâtiments se trouvent deux serres en dur dans lesquelles le collectif cultive un potager solidaire autogéré. Il y a quelques mois, nous étions à nouveau dans ce lieu magnifique pour peaufiner le tournage de notre quatrième documentaire, « Nous n’avons pas peur des ruines » (qui sortira l’hiver prochain). La plupart des membres de l’assemblée du squat sont aussi membres de l’organisation AK (Mouvement antiautoritaire pour la démocratie directe).
L’une des serres du « Jardin Botanique » / Tournage de « Nous n’avons pas peur des ruines, il y a quelques semaines, dans l’autre serre / Visite du « Jardin Botanique » par des membres du convoi, il y a quelques jours
Dès le lendemain, la sécurité du grand squat a été renforcée, notamment avec la participation de membres de Rouvikonas venus apporter leur soutien, ainsi que plusieurs groupes antifascistes.
Vendredi soir, les nombreux camarades et compagnons de luttes venus d’un peu partout ont formé une immense patrouille à motos qui est partie sillonner les rues du quartier, puis de tout l’ouest d’Athènes, sous le nez des flics immobiles et silencieux, jusque tard dans la nuit.
Hier à midi, une grande manifestation antifasciste, cette fois à pied, est partie de la place ronde de Petroupoli pour rejoindre le « Jardin Botanique », avec beaucoup de monde.
Durant la semaine, d’autres lieux autogérés ont remarqué une profusion de tags fascistes et néonazis sur leurs murs extérieurs. Beaucoup plus qu’à l’ordinaire. Ces lieux sont pour la plupart anarchistes et souvent en lien avec l’aide aux migrants, mais pas seulement.
Au nord-ouest du quartier d’Exarcheia, dans la nuit de lundi à mardi, des tracts fascistes menaçants ont été déposés autour du squat Notara 26 par le groupe « Cri de guerre » qui se revendique ouvertement du « national-socialisme ». Un autre groupe fasciste, nommé « Against Modern Athens », multiplie également les menaces contre le squat de réfugiés et migrants. C’est précisément ce groupe fasciste qui avait réussi, en septembre dernier, à arracher l’une des banderoles de la façade du Notara 26, pour ensuite publier une photo sur laquelle ils posaient avec la banderole à l’envers accompagnée de slogans haineux.
Bref, nous sommes actuellement en alerte. D’autant plus que l’État agit, lui aussi, contre certains de nos lieux. Le Notara 26 a encore subi des coupures de son système d’alimentation électrique la semaine passée. D’autres squats font sans cesse l’objet de tentatives d’intimidation. Les voltigeurs à motos circulent au plus près de nos lieux autogérés pour contrôler et brutaliser les militants et les migrants, et quelquefois pire à l’égard des filles. Le pouvoir cherche à faire peur et, simultanément, la peste brune ressort de sa tombe, telle une milice venant lui donner le bras !
Nos luttes actuelles concernent aussi la gentrification galopante du centre d’Athènes et les travaux inutiles et nuisibles, à commencer par l’offensive de l’État qui essaie de construire une station de métro sur la place centrale du quartier à Exarcheia, contre l’avis de la population, ainsi que développer des projets immobiliers sur la verte colline de Strefi. Comme le titrait récemment un article d’Elsa Perrigueur dans l’Huma : « Exarcheia [est devenue] une zone à défendre au cœur d’Athènes ».