Les PatriotesPhilippot et ses (sans-)amis contre la « coronafolie »

Depuis fin octobre et le second confinement, « Les Patriotes », le mouvement de Florian Philippot, organise des rassemblements hebdomadaires à Paris, devant le ministère de la santé : initialement organisés le vendredi, ils ont désormais lieu les samedis après-midi. Philippot et ses sympathisants y dénoncent la « dictature sanitaire », mais ils ne sont pas les seuls, puisque ces rassemblements sont aussi l’occasion de réunir une partie de l’extrême droite parisienne, des partisans de Dupont-Aignan à Paris Nationaliste en passant par Terre & Peuple.

Alors que les Patriotes, en région, peinent à rassembler plus d’une dizaine de personnes, le rassemblement parisien a pu réunir jusqu’à près de 200 personnes. Si on reste très loin des mobilisations de milliers de personnes dans d’autres pays européens, cela reste la plus importante manifestation de ce type en France, ce qui représente sans doute pour Philippot et ses amis un espoir d’exister, comme pour les autres groupuscules venus en parasite sur son rassemblement.

La grenouille patriote veut se faire aussi grosse que le bœuf RN

Les Patriotes, fondé par Philippot en 2017, était jusque-là cantonné à un mouvement issu de plusieurs départs du Front national, avec au cœur de leur programme le Frexit. Florian Philippot, qui fut pendant cinq ans le vice-président du Front national, le bras droit de Marine Le Pen et le principal communicant du FN, se considère pourtant comme gaulliste, se rendant tous les ans à Colombey les deux Eglises sur la tombe du général.

Philippot à Colombey-les-deux-Églises, le 9 novembre 2019.

Mais après son départ, son parti n’a jamais réussi à se démarquer du FN devenu Rassemblement national, restant à l’état groupusculaire. Il avait tenté de s’incruster lors de différentes mobilisations syndicales, en 2018 et 2019 pour les retraites.
Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, c’est avec le développement de la pandémie et les restrictions qui s’en suivirent que le mouvement « souverainiste » s’est senti pousser des ailes : Florian Philippot sort un livre en septembre 2020 à propos de la gestion par le gouvernement français de l’épidémie du COVID-19, dont le titre sent le complotisme à plein nez : L’oligarchie démasquée. A cette occasion, il fut invité et interviewé par Marion Maréchal pour son école l’ISSEP en décembre dernier .

Il a eu droit aussi à une chronique dans la revue antisémite nationaliste-révolutionnaire Réfléchir & Agir.
Dans la foulée, les Patriotes commencent donc leurs rassemblements devant le ministère de la santé en octobre. L’occasion pour lui d’en remettre une couche sur l’Union européenne et le Frexit : l’Europe serait dépendante des laboratoires pharmaceutiques et donc inutile, et il déclare dans une interview à Valeurs Actuelles le 22 janvier : « La crise du coronavirus et le désastre économique qui vient nous prouvent une fois pour toute que nous avons un besoin impérieux de souveraineté. ».

Par ailleurs, en janvier, là encore histoire de se démarquer, lors de l’attaque du Capitole à Washington, il continue à apporter son soutien à Trump ; en affirmant : « Je ne parle même pas des suspicions de fraude lors des élections américaines, sujet qu’il est désormais strictement interdit d’aborder sur les réseaux sociaux. », toujours dans Valeurs Actuelles.

Le club des losers

Etant le seul, à l’extrême droite, à organiser des rassemblements réguliers à propos des restrictions sanitaires, il a rameuté, probablement sans toujours l’avoir voulu, d’autres losers nationalistes.
On peut ainsi y voir quelques Gilets Jaunes égarés, mais aussi des « personnalités » souverainistes comme Nicolas Dupont-Aignan ou Patrick Mignon, porte-parole de « VIA la voie du peuple », le nouveau nom du Parti Démocrate Chrétien de Jean Frédéric Poisson.

Dupont-Aignan, Poisson et Philippot s’étaient à plusieurs reprises retrouvés ensemble lors de réunion de souverainistes comme lors de la sorti du Royaume Uni de l’Union européenne ou lorsque Dupont-Aignan est passé à la fête des Patriotes en juillet.
Plus surprenant, des groupuscules plus radicaux, qui il y a à peine quelques mois auraient craché sur Philippot et son gaullisme républicain, se sentent à présent en bonne compagnie avec les Patriotes… Il est vrai que quand on est sans amis, on ne fait pas les difficiles.

De haut en bas : le Paris Nationaliste, Vincent Vauclin, Alexandre Simmonot

Ainsi, pas vraiment étonnant de voir à ces rassemblements le président du Mouvement National-Démocrate (nouveau nom de la Dissidence Française) Vincent Vauclin, Paris Nationaliste (le groupe parisien des Nationalistes, le mouvement fantomatique héritier de l’œuvre française aujourd’hui dissoute), Alexandre Simonnot (très proche de Jean Marie Le Pen, il était son témoin à son mariage en janvier) du Parti de la France, les racialistes néopaïens de Terre & Peuple, l’antisémite Florian Rouanet ou le confusionniste Sylvain Baron.

Philippot et les has been du show-biz

Remarquons au passage que Philippot déclarait dans Valeurs Actuelles « Je ne crois plus au rassemblement des souverainistes par les chefs », on retrouve pas mal de personnes souhaitant se présenter aux présidentielles de 2022 : Philippot lui-même, mais aussi Dupont-Aignan, Jean Frédéric Poisson ou Vincent Vauclin. Des « personnalités » si l’on peut dire, se sont fait remarquer autour de Philippot :
 l’acteur Franck de Lapersonne, qui avait rejoint les Patriotes avant de quitter le parti au bout d’un an et demi ;

Franck de Lapersonne et Philippot en 2017.


 Marcel Campion, le « roi des forain », qui l’a aidé à avoir un local à Saint Ouen en Seine Saint Denis ;
 enfin, Gérard Marchand, maire d’une petite commune, Brachay, présentée comme le « berceau du marinisme », l’avait rejoint (à partir de 2012, Marine Le Pen y faisait sa rentrée politique, voyant dans ce petit village de Haute-Marne un symbole de la « France des oubliés »).

Philippot et Gérard Marchand

À présent c’est Bèbère, le chanteur d’un groupe de variété rockabilly des années 80, les Forbans, qui était invité au rassemblement du 30 janvier.

Son groupe avait déjà joué dans des villes gérées par des mairie FN, en août 2014 à Fréjus, en 2015 à Hénin Beaumont ou en mars 2016 à Villers Cotterêts. « “Danse, danse, danse et mets tes baskets-kets, c’est sympa, tu verras-ras, vas-y ramène-toi, et tout le monde chez Philippot… » Échec de rimes !

La Horde