Avec le svastika (ou croix gammée), la croix celtique est sans doute l’un des symboles les plus repris par les mouvements d’extrême droite à travers le monde.
La croix celtique telle que nous la connaissons aujourd’hui (une croix inscrite dans un cercle et dont les branches dépassent de ce cercle) est un symbole chrétien apparu en Europe de l’Ouest, en particulier en Irlande. Ce fait, avéré par des découvertes archéologiques, n’empêche pas les mouvements nationalistes de lui trouver d’autres origines, souvent plus anciennes mais la plupart du temps totalement fictives. Parmi les théories les plus répandus dans les rangs des nationalistes français il est couramment raconté que la croix celtique serait le symbole de l’alliance de la royauté et de l’église. Selon une version, largement répandue elle-aussi, cet emblème symboliserait la rencontre des nos origines celtes (la roue, symbole solaire) avec la civilisation romaine christianisée (la croix) [1].
Il semble aujourd’hui certain qu’à l’origine la croix celtique est une récupération chrétienne de la roue solaire, c’est à dire une croix inscrite dans un cercle. Ce symbole, la roue solaire, qui date du néolithique et peut parfois prendre la forme d’une roue d’un char solaire, est présent sur tous les continents. Certains estiment son apparition à 6000 ans av. JC.
Pour ce qui est de la croix celtique proprement dit, elle trouverait son origine au IV ème siècle dans un couvent irlandais très influent et dont les tombes en étaient ornées. Dans le contexte d’une Irlande libre de toute influence romaine et donc émancipée en partie des canons du christianisme continental, le symbole s’est alors exporté à l’ensemble des Iles Britanniques avant d’atteindre l’Europe continentale.
De fait si la croix celtique est dans certains pays comme les Etats-Unis ou l’Allemagne un symbole plus politique et extrémiste que religieux, en Irlande ou en Ecosse, celle-ci reste un symbole courant, lié au folklore et à la culture locale. Il n’est pas rare encore aujourd’hui de voir des croix celtiques dans les cimetières, sur les églises ou même sur les habitations.
En France l’utilisation de la croix celtique par l’église catholique reste très anecdotique avant le XXème siècle. C’est suite à sa récupération à des fins politiques que cette croix va atteindre une certaine notoriété. Ainsi le Père Paul Doncoeur sera le premier à se l’approprier et à en faire son symbole personnel. Ancien aumônier de l’armée en 14-18, proche des mouvements catholiques réactionnaires, il se lance en politique en 1924 contre l’arrivée au pouvoir du Cartel des Gauches. Cette première apparition de la croix celtique va définitivement l’ancrer à l’extrême droite. Quelques années plus tard, ce symbole refait surface sur les casques et drapeaux des mouvements de jeunesses de Vichy comme les Equipes Nationales [2].
Au lendemain de la guerre, en 1949, la croix celtique devient le symbole des militants du mouvement Jeune Nation de Pierre Sidos. Elle est alors choisie en opposition à la croix de Lorraine du général De Gaule, mais également en raison de l’appartenance de nombreux membres de Jeune Nation aux Equipes Nationales de Vichy.
Après la dissolution de Jeune Nation en 1958, ses membres fondent le Parti Nationaliste puis la Fédération des Etudiants Nationalistes, la FEN, reprenant à chaque fois la croix celtique comme symbole.
Durant la guerre d’Algérie, la croix celtique sera utilisée par bon nombres de militants et sympathisants de l’OAS pour signer leurs tracts et leurs actions.
En 1964, avec le mouvement Occident, toujours fondé par Pierre Sidos, la croix celtique s’impose définitivement dans le panthéon nationaliste français, ce symbole étant systématiquement repris par les mouvements (GUD, Ordre Nouveau) ayant pris la relève d’Occident après sa dissolution le 1er novembre 1968.
Le PFN, Parti des Forces Nouvelles, mouvement issu d’Ordre Nouveau après son interdiction en 72 et grand rival du Front National dans les années 70, arbore également la croix celtique.
Entre temps, en 1968, Pierre Sidos, en désaccord avec la ligne générale d’Occident, crée l’Œuvre Française et se réapproprie la paternité du choix de la croix celtique. Il en propose même une version spécifique, en lui associant les couleurs bleu et rouge.
Dans les années 80 et 90 d’autres mouvements nationalistes ont utilisé ce symbole comme le Renouveau Nationaliste, le GUD, Troisième Voie, le PNFE, Nouvelle Résistance, Unité Radicale.
Durant la dernière décennie, l’Œuvre Française et sa branche lyonnaise Jeune Nation, le Réseau Nationaliste de Thierry Maillard (ancien de l’Œuvre Française), le GUD nouvelle version, dans une moindre mesure le Renouveau Français et les Jeunesses Nationalistes d’Alexandre Gabriac (mouvement de jeunesse de l’Œuvre Française), ont fait de la croix celtique leur emblème.
Une croix celtique connaît également un certain succès dans le milieu skinhead nazis franais, qui depuis les années 80, est régulièrement associée aux logos et pochettes d’albums des groupes de ce milieu.
Au niveau international la croix celtique par la force des choses est devenue le symbole d’identification des nationalistes blancs du monde entier, en particulier dans les années 80 où de nombreux groupes RAC, à commencer par le plus célèbre d’entre eux Screwdriver, l’utiliseront pour illustrer ses pochettes de disques.