Invité par Emmanuel Macron a assister au célébration du 14 juillet en France, le premier ministre indien Narenda Modi transforme la démocratie en état fasciste comme le décrit la philosophe Catherine Clément. A lire entier sur le site du mensuel CQFD
Une période pré-génocidaire
Dans un texte éclairant, la philosophe Catherine Clément raconte comment elle a vu « naître le fascisme » en Inde, bien avant l’arrivée de Modi au pouvoir. Un terme utilisé avec prudence il y a encore quelques années pour décrire le régime de l’ultranationaliste Modi, mais qui correspond désormais à la réalité politique du pays. Durant son premier mandat, de 2014 à 2019, il y a notamment eu les lynchages impunis de musulmans accusés de manger des vaches sacrées, les directeurs d’université remplacés par des proches du pouvoir, la falsification des livres scolaires dont le gouvernement a fait enlever d’importantes parties de l’histoire musulmane du pays. Car l’un des objectifs du parti au pouvoir, le BJP *, est de faire de l’Inde un État hindou et d’en chasser les autres minorités religieuses qui composent le pays. En cette fin de deuxième mandat et alors que le BJP en brigue un 3e pour les élections générales de mai 2024, le régime accélère sa fascisation : captation par l’exécutif d’une institution comme la commission électorale, poursuite des médias qui ont osé produire des critiques et mise au pas des autres médias grâce à la connivence avec le monde des affaires. Dernier épisode en date : la censure du documentaire de la BBC qui expose la responsabilité de Modi dans le pogrom antimusulman de 2002 et les perquisitions qui ont suivi aux sièges de la BBC en Inde. En mars, le principal leader d’opposition, Rahul Gandhi, a été condamné à deux ans de prison dans une tentative de l’empêcher d’exercer ses fonctions politiques. Le culte de la personnalité a pris des formes impressionnantes dans le cadre des réunions du G20, la photo du Premier ministre flanquée d’un « G20 » se retrouvant actuellement à tous les coins de rue des grandes villes indiennes. Enfin, certains analystes comme la chercheuse Shivangi Mariam parlent d’une période « pré-génocidaire », alors que chaque mois des violences contre des musulman·es sont répertoriées, et qu’en avril, à Bihar Sharif, dans l’est de l’Inde, une bibliothèque musulmane de 4 500 livres a été incendiée par un millier de personnes armées, sans que la police intervienne…
* Le Parti du peuple indien (BJP) est le principal parti de la coalition de droite au pouvoir depuis l’élection de Narendra Modi en 2014. Il est porteur d’un programme ethnonationaliste islamophobe et xénophobe.